Transformation : Quel rôle avons-nous en tant que société de Conseil ?
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Transformation : Quel rôle avons-nous en tant que société de Conseil ?

« Les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise »

Cela fait un petit moment que je m’interroge sur l’action que nous pouvons (devons) avoir en tant que société de conseil sur les entreprises que nous accompagnons, sur les modèles de développement que nous encourageons, sur les mesures de performance que nous mettons en œuvre. La crise sanitaire que nous traversons depuis plusieurs semaines et que nous subirons certainement pour encore de longs mois, rend cette réflexion encore plus d’actualité grâce à la prise de distance que cet « épisode » nous apporte et par la rhétorique du changement qui accompagne ces événements.

Je ne m’inscris pas forcément dans le sillage de ceux qui veulent renverser la table, dessiner un jour d’après où tout ne serait plus comme avant, où les modèles actuels seraient à ranger dans les livres d’histoire, car le réalisme à la dent dure et que pour relancer la machine, nous risquons de nous accrocher à ce que nous connaissons et qui nous apporte des certitudes.

Toutefois, si l’on suit la citation de Jean Monet, « les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise », c’est peut-être le bon moment de lancer quelques idées.

Accompagner nos clients dans leur transformation

Les Sociétés de Conseil en Management ont pour vocation à accompagner les programmes de transformation de leurs clients avec pour objectif d’améliorer leur performance, mieux répondre aux attentes de leurs propres clients et ce faisant répondre aux objectifs de croissance. La finalité est d’accroître la valeur : la valeur financière au travers d’une croissance soutenue et d’une meilleure rentabilité, la valeur délivrée pour le client et perçue par celui-ci, la valeur technologique mesurée par le niveau d’innovation intégré au business modèle de l’entreprise.

« les notions de bien-être et d’épanouissement au travail, d’équilibre vie privée-vie professionnelle sont des indicateurs très importants »

Il serait faux et pas très honnête de réduire la mesure de la performance et de la valeur d’une entreprise aux critères que je viens d’énumérer. De plus en plus, les notions de bien-être et d’épanouissement au travail, d’équilibre vie privée-vie professionnelle sont des indicateurs très importants qui forment un socle nécessaire au développement et à la croissance (et qui n’est pas seulement une réponse tactique au durcissement du marché du travail – mais c’était avant l’apparition du COVID 19, donc espérons que les priorités ne changent pas). De même, les approches RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) deviennent incontournables et les entreprises se doivent d’afficher leur bilan en la matière.

Mais que pèsent ces éléments à l’heure d’estimer la valeur d’une entreprise : un bilan RSE restera toujours en retrait d’un bilan financier, un indicateur de croissance, de développement à l’international aura toujours plus de poids qu’un taux de turn over ou qu’un indice de satisfaction des salariés, le niveau de digitalisation et d’innovation des cas d’usage développés par l’entreprise sera scruté et valorisé bien plus sûrement que l’impact sociétal / environnemental / solidaire de ces mêmes cas d’usage.

N’est-il pas temps d’apporter un peu plus d’équilibrage dans ce qui fait la réussite, le positionnement concurrentiel et la valeur d’une entreprise ?  Est-ce que cela ne constituerait pas un premier niveau de réponses, appliqué à la micro-économie, aux aspirations aux changements que la crise sanitaire actuelle exacerbe et qui sont réclamées par tous ceux qui prennent la parole dans les médias et les réseaux sociaux : politiques, économistes, intellectuels, sociologues, citoyens. Il faut accélérer les tendances vertueuses dont nous parlions plus haut, les ancrer de façon irréversible dans de nouveaux modèles de développement.

Quel peut-être notre rôle dans ce travail de fond qui prendra forcément du temps ?

Tout d’abord et c’est peut-être le plus simple, être exemplaire et montrer la voie vers ce changement : travailler le bien-être de nos collaborateurs, l’écoute de leurs aspirations et ambitions, travailler à instaurer un équilibre réciproque (salariés et entreprise) entre droits et devoirs ; développer le télétravail qui reste une des meilleures façons de réduire l’emprunte carbone de nos déplacements ; mettre nos compétences, notre énergie, nos aspirations (avec une moyenne d’âge de 33 ans au sein de notre groupe, les aspirations de la jeune génération à donner du sens à leurs actions sont un vrai moteur), nos moyens financiers également, vers plus de justice, plus de solidarité, plus de partage ; utiliser le filtre environnement / développement durable dans les choix que nous faisons en terme d’offres de conseil et de missions que nous réalisons. A titre d’illustration, je me fais l’écho de ce que notre directeur du LAB Intelligence Artificielle, Jean-Luc Marini, a dit dans l’une de ces prises de parole récente : « L’iA n’est pas un ensemble de technologies bonnes ou mauvaises, c’est l’usage qu’on en fait qui la rend bénéfique ou maléfique pour le genre humain ». Au sein d’Axys Consultants, nous investissons massivement dans l’iA mais à nous d’être vigilants pour en faire bon usage.

Ensuite, il s’agit d’encourager nos clients à s’engager plus fortement vers le modèle équilibré que j’ai évoqué, en lançant des projets et des initiatives qui progressivement font évoluer le centre de gravité des enjeux d’évolution et de développement : plans et approches RSE beaucoup plus ambitieux, ayant des impacts mesurables et significatifs;  mise en place des nouveaux modes de travail qui servent tout autant le bien être des salariés que le bilan environnemental ; nouvelle politique voyages et déplacements qui doit permettre de diminuer l’utilisation des moyens de transports consommateurs en énergies fossiles (la période de confinement a parfaitement démontré la capacité de fonctionner à distance et nous pouvons encore améliorer les choses en optimisant les outils, les méthodes de management et de gestion de projet adaptés au travail à distance) ; nouvelle politique achat et de sourcing qui privilégie les circuits courts et les fournisseurs qui respectent les règles environnementales et sociales (il faut du reste que les critères se durcissent dans les consultations des acheteurs et que les notations des organismes spécialisés soient beaucoup plus exigeantes, notamment en surpondérant les actions qui ont un véritable impact) ;   choix d’innovations et de business modèles qui soient vertueux d’un point de vue écologique…

Enfin, il faut aider les entreprises à « marketer » ces initiatives, à intégrer ces nouveaux critères dans les processus d’analyse et de décision, à infuser toutes les strates de l’entreprise sur ces questions qui doivent s’imposer. Nous sommes bien placés pour le faire, puisque nous, sociétés de Conseil, intervenons traditionnellement :

  • Sur l’élaboration et la production de tableaux de bord de pilotage et de mesure de la performance. Il faut intégrer ces nouveaux indicateurs dans les reporting pour qu’ils s’imposent sur le marché comme aussi essentiels que la croissance, la rentabilité, la rémunération des investissements. Cela prendra forcément du temps, mais le nombre (d’entreprises qui suivront ce chemin) fait la force ;
  • Sur le re-engineering de processus ;
  • Sur la communication et la conduite du changement. Montrer comment l’entreprise évolue, présenter la trajectoire dans laquelle elle s’engage, donner du sens à son rôle sur le marché et dans la société, convaincre de l’importance de ces nouveaux critères, doivent être des objectifs de la direction générale et faire l’objet d’une véritable politique interne.

Le pari sera gagné lorsque les sociétés tout en haut des valorisations boursières ou qui s’arracheront sur le marché seront celles dont l’indice de bien-être des salariés, la notation RSE, le rôle sociétal, la croissance vertueuse (qui reste à qualifier) sont les plus élevés.

Tribune de Marc Sailly, Président du groupe Axys, parue sur Fexter

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